Révision du règlement sur les biens à double usage : le Parlement européen examine le projet et l’UIC reste mobilisée

Révision du règlement sur les biens à double usage : le Parlement européen examine le projet et l’UIC reste mobilisée Révision du règlement sur les biens à double usage : le Parlement européen examine le projet et l’UIC reste mobilisée Dans un environnement international où la sécurité, la sûreté, le risque de détournement ou de prolifération des armes de destruction massive sont devenus des enjeux majeurs, on assiste à une multiplication de nouveaux textes réglementaires dans ce domaine, ou à des mutations de règlements existants, avec des conséquences parfois non maîtrisées sur l’industrie. A ce titre, la révision en cours du règlement communautaire sur le contrôle des exportations des biens et technologies dits "à double-usage" (BDU), civil et militaire, illustre cette tendance. Le Comité INTA (Commerce International) du Parlement européen essaie actuellement, tant bien que mal, d’élaborer un compromis suite aux différents amendements déposés par ses membres, dans le cadre de l’examen du rapport parlementaire sur le projet de révision du règlement 428/2009 sur le contrôle des exportations de biens à double usage. Selon la définition usuelle, relèvent de cette catégorie les « biens, les équipements - y compris les technologies, logiciels, le savoir-faire immatériel ou intangible – susceptibles d’avoir une utilisation tant civile que militaire ou pouvant - entièrement ou en partie - contribuer au développement, à la production, au maniement, au fonctionnement, à l'entretien, au stockage, à la détection, à l'identification, à la dissémination d'armes de destruction massive » (ADM - nucléaires, biologiques, chimiques, etc.). Quand la « clause attrape-tout » devient la règle Si le sujet peut sembler très technique, avec l’obligation d’obtenir des licences d’exportation, il est en fait très politique. Tel que proposé par la Commission européenne, le projet de révision vise à étendre le champ d’application de cette réglementation à de nouveaux domaines, comme la cyber-surveillance, à imposer plus fortement la lutte contre le terrorisme ou le respect des Droits de l’Homme comme des conditions d’application, ou à faire de la « clause attrape-tout » non plus une règle d’exception mais une règle principale. Jusqu’à maintenant une liste de produits à double usage publiée au JOUE* constituait la base de travail pour tout industriel souhaitant savoir s’il était concerné par la règlementation et donc obligé de faire une demande de licence d’exportation BDU auprès des autorités compétentes. Certes, on avait à gérer en plus, quelques cas spécifiques nationaux qu’il convenait d’ajouter à la liste européenne, et parfois, des produits non listés pouvaient faire l’objet de contrôle de la part des autorités (ce qui justifiait l’application de la « clause attrape-tout »), mais cela restait marginal. Le projet de révision tel qu’il est débattu actuellement à Bruxelles vise à créer deux listes séparées de biens et technologies contrôlés : une traditionnelle pour les biens à double usage, et une nouvelle sur la cyber-surveillance, sans que l’on sache précisément, à ce jour, qui va établir cette liste et ce qu’elle contiendra. De la même façon, on aurait deux clauses « attrape-tout », dont une sur la cyber-surveillance au titre des Droits de l’Homme. Concrètement, le champ du règlement s’élargirait dangereusement. De nombreux exportateurs, notamment des PME-ETI, non concernés par cette règlementation jusqu’à présent seraient désormais aux premières loges, avec une utilisation disproportionnée des « clauses attrape-tout ». L’UIC a fait part de ses inquiétudes auprès des autorités françaises, notamment le Service des Biens à double usage du Ministère de l’Economie dès la publication de la proposition de la Commission européenne en septembre 2016. Une dérive réglementaire qui risque d’imposer toujours plus de contraintes aux industriels De notre point de vue, il y a une dérive du règlement, qui ne concernerait plus stricto sensu les biens à double usage (BDU) : La réglementation BDU va sortir de son cadre et déborder dans des domaines couverts par d'autres réglementations, ce qui va nuire à notre compétitivité, avec un effet « mille-feuille réglementaire », par exemple le règlement communautaire de 2014 sur les précurseurs chimiques d'explosifs ou la convention pour l’interdiction des armes chimiques, L'argument concernant les violations sérieuses des droits de l'homme n'a pas sa place dans la réglementation BDU : ce sujet est couvert par le régime des sanctions (embargos...) mis en place par l'UE vis-à-vis de pays connus et listés La clause attrape-tout qui, dans l'esprit initial de la réglementation BDU, devait être utilisée en dernier ressort pour des produits non listés, devient une règle en tant que telle et risque d'être utilisée de façon abusive pour beaucoup de produits actuellement non concernés. Certes, il y a des points positifs dans cette réforme, concernant le rallongement de la période de validité des licences par exemple ou la nécessité de créer des autorisations mondiales d’exportation pour les grands projets, mais globalement le projet risque de créer de nouvelles contraintes pour de nombreux industriels. Le chemin est encore long avant un accord politique au niveau européen sur ce projet. Le Conseil de l’UE ne s’est pas encore positionné et ne devrait pas le faire avant la présidence autrichienne de l’UE début 2018. Mais le débat au sein du Parlement européen c’est maintenant. Un nouveau compromis devrait circulariser cet été pour une adoption à session plénière de la Commission INTA en octobre 2017. L’UIC reste donc mobilisée, directement ou au sein du groupe de travail Export Control du MEDEF ou encore au sein du CEFIC. *Journal officiel de l'Union européenne